Archive pour janvier 2012

Le Crépuscule des dieux de Richard Wagner par Robert Lepage : une lueur sobre pour la conclusion de L’Anneau du Nibelung

samedi 28 janvier 2012

28 janvier 2012
(No 2012- 04)

Photographie : Daniel Turp, 2012

Les opéraphiles de New York ont rempli les 3 995 places du Metropolitan Opera House pour assister à la première de Götterdämmerung (Le Crépuscule des dieux) de Richard Wagner et la fin du cycle Der Ring des Nibelungen (L’anneau du Nibelung) dont la mise en scène a été confiée à Robert Lepage. Comme je l’avais fait pour Das Rheingold (L’or du Rhin) lors de l’inauguration de ce nouveau cycle le 28 septembre 2010, je me suis rendu à New York hier pour assister  la première du dernier opéra de la tétralogie de Wagner et à cet autre grand moment dans la vie lyrique de la compagnie newyorkaise, mais aussi de notre scénographe québécois.

Robert Lepage a choisi une lueur sobre pour Le crépuscule des dieux et a offert, avec son équipe d’Ex Machina, une lecture plus dépouillée de la conclusion du Ring. Aux effets visuels spectaculaires des deux  premières productions et aux projections 3D de la troisième, le metteur en scène québécois a préféré cette fois-ci des tableaux plus traditionnels soutenus par les projections sur sa maintenant « célébrissime » machine. Cette machine grince parfois, et fait grincer des dents le mélomane que je suis. Je ne crois être le seul à avoir été  agacé par le bruit des pales qui se produit au moment des interludes instrumentaux et des plus belles pages musicales de la partition de Wagner.

La mise en scène offre quelques moments lumineux, comme la traversée du Rhin de Siegfried. Conçu par l’équipe d’Ex Machina, le  cheval qui accompagne Siegfried pendant cette traversée séduit de toute évidence l’auditoire. D’aucuns ont été ou pourraient être déçus par la scène de l’immolation qui ne correspond guère aux images évoquées dans l’affiche de la production. La scène finale est également d’une étonnante simplicité et Robert Lepage a, de toute évidence, préféré achever le cycle sur une note plus poétique. Cette nouvelle audace explique sans doute que des « loggistioni » ont, comme cela avait fait à la fin de L’or du Rhin, lancé quelques huées au moment où Robert Lepage montait sur scène pour saluer la foule à la fin de la représentation.

Le succès de cette production repose aussi et surtout sur la distribution exceptionnelle que le directeur général du MET, M. Peter Gelb,  aura rassemblé pour Robert Lepage. Deux interprètes se distinguent particulièrement. La basse allemande Hans-Peter König offre une prestation vocale exceptionnelle et fait du personnage de Hagen le pilier de ce Götterdämmerung. Il en va de même pour la mezzo-soprano allemande Waltraude Meier qui incarne le rôle de Waltraute et dont le duo avec sa sœur Brünhilde offre le plus beau moment lyrique de la soirée. La soprano américaine Deborah Voigt incarne une Brünhilde forte et  sa prestation vocale est d’une étonnante stabilité tout au long de ce marathon vocal de près de six heures dont elle est le personnage principal. Dans son rôle de Siegfried et en remplacement de Gary Lehman, le jeune ténor Jay Hunter Morris tire son épingle du jeu, mais la voix semble tendue dès le deuxième acte. Le baryton-basse Eric Owens reprend le rôle d’Alberich qu’il a tenu dans deux des trois autres opéras du cycle et démontre à nouveau qu’il est un des grands chanteurs lyriques de sa génération. Les autres artistes qui complètent la distribution, Wendey Bryn Harmer dans le rôle de Gutrune et Ian Paterson dans celui de Gunther,  font de cette équipe l’une des grandes distributions du Ring de ces dernières années.


Deborah Voigt et Jay Hunter Morris
GötterdämmerungMetropolitan Opera
Photographie : Ken Howard, 2012

La direction musicale assurée par Fabio Luisi a reçu, avec raison, des applaudissements nourris de la part de l’auditoire du MET. Avec les instrumentistes du plus prestigieux orchestre lyrique de la planète, il a démontré pourquoi la musique de Richard Wagner séduit tant et a offert toutes les nuances qui font croire à l’éternelle beauté de cette musique.

Cinq autres représentations sont prévues pour Götterdämmerung, mais sont à guichets fermés. Le cycle complet du Ring sera présenté au Metropolitan Opera à compter du mois d’avril et y sera repris à la fin de la saison 2013. Le crépuscule des dieux sera diffusé dans le cadre de la série MET Live in HD dans les salles Cinéplex le samedi 11 février 2012 à compter de midi.

Et le blogueur lyrique a été invité à commenter Le Crépuscule des dieux à l’émission Bouillant de culture animé par Patrick Masbourian sur la première chaîne de Radio-Canada. L’entrevue sera diffusée aujourd’hui entre 14 h et 16 h cet après-midi.

Il Trovatore de Verdi à l’Opéra de Montréal : de belles voix, une mise en scène peu convaincante

Pour le troisième rendez-vous de la saison 2011-2012, l’Opéra de Montréal présentait Il Trovatore de Giuseppe Verdi. En dépit du fait qu’elle aura été joué à guichets fermés ou presque, cette production ne marquera pas les annales de la compagnie lyrique montréalaise comme l’avait fait la Madama Butterfly à laquelle avait été associé la soprano japonaise Hiromi Omura en 2008.

C’est sans doute toutefois grâce à cette dernière que les opéraphiles ont apprécié l’œuvre de Verdi lors de la première du 21 janvier dernier. La voix est belle et l’intensité de sa prestation dramatique s’accroît tout au long de l’opéra. Elle est à son meilleur dans le quatrième et dernier acte et démontre cette sensibilité recherchée chez toute grande interprète du rôle de Leonora. Le baryon Gregory Dahl dans le rôle du Comte di Luna et la basse Ernesto Morillo dans celui de Ferrando contribuent à la réussite de cette production sur le plan vocal, ce qui est moins évident pour la mezzo-soprano Laura Brioli dont la prestation d’Azucena est inégale. Quant au trouvère et en dépit du fait qu’il réussit avec facilité le contre-ut de l’air Di quella pira, on ne retrouve pas chez le ténor coréen Dongwon Shin le talent d’acteur si essentiel à ce rôle. Parmi les stagiaires de l’Opéra de Montréal, la soprano Karine Boucher se distingue à nouveau et propose une Inez qui démontre son grand potentiel lyrique et dramatique.

Sans doute la direction d’acteurs d’Oriol Thomas n’a guère facilité les choses pour cette distribution. Le jeu scénique et les insertions chorégraphiques créent sur scène une impression de confusion, sans parler de cette diversion inacceptable résultant, pour reprendre l’expression colorée du critique musical du journal Le Devoir Christophe Huss, de ce « zozo qui fait sa toilette » au début du troisième acte. Celui qui nous avait offert une mise en scène honorable de l’opéra Le Consul de Carlo Menotti l’année dernière n’est sans doute pas encore prêt à relever le défi que représente l’un des grands opéras de la trilogie de Verdi,

En revanche, la direction par Francesco Maria Colombo de l’Orchestre symphonique de Montréal est exemplaire et le chef fait ressortir toutes les couleurs, dans les moments les plus spectaculaires et comme les plus intimes, de la magnifique partition de Verdi. Le Chœur de l’Opéra de Montréal préparé par Claude Webster est également à la hauteur.

Une dernière représentation d’Il Trovatore est prévue pour ce soir et est prévue pour 19 h 30 à la salle Wilfrid Pelletier de la Place des Arts…précédée d’une conférence pré-opéra par le musicologue Pierre Vachon.

Pour les opinions des critiques musicaux sur cette production d’Il Trovatore diffusées les 22 et 23 janvier 2012, vous pourrez l’article de Claude Gingras publié dans La Presse sous le titre « Il Trovatore : bon, beau, pas cher », celui de Christophe Huss paru dans Le Devoir sous le titre « Un Trouvère pour les voix » et le texte de Wah Keung Chan dans The Gazette intitulé « Korean tenor Dongwon Shin is a revelation; Canadian baritone Gregory Dahl débuts ».


Hiromi Omura en Leonora dIl Trovatore
Photographie : Yves Renaud © 2012

Le quinzième Gala des Prix Opus et ses finalistes « lyriques »

Le XVe Gala des Prix Opus du Conseil québécois de la musique aura lieu le dimanche 29 janvier et j’espère que les finalistes « lyriques » dont j’ai fait la présentation dans un tableau publié dans Le blogue lyrique (No 2011-45) (26 novembre 2011) feront belle figure lors du Gala. J’y serai présent et vous présenterez les lauréats et lauréates lyriques  dans le  blogue de la semaine prochaine.

La voix de Marie-Josée Lord au service de l’Institut du cancer de Montréal

Accompagnée par l’Orchestre métropolitain et le chef invité Stéphane Laforest, la soprano Marie-Josée Lord prêtera mettre à nouveau sa voix au service d’une bonne cause et plus précisément pour l’Institut du cancer de Montréal. Elle proposera un programme composé d’airs de Georges Bizet, Giacomo Puccini et George Gerschwin. La jeune violoniste Marie-Ève Poupart prendra également part à l’événement. Ce concert aura lieu à la Maison symphonique de Montréal le vendredi 3 février 2012 à 20  h et vous pouvez vous procurer des billets en téléphonant au 514-890-8213.

À L’Opéra du samedi, Espace musique radiodiffusera en direct du MET Tosca de Giacomo Puccini.  la distribution comprend Patricia Racette, soprano (Tosca), Marcello Alvarez, ténor (Cavaradossi), James Morris, baryton-basse (Scarpia) et Paul Plishka, basse (le sacristain). L’orchestre et les chœurs du Metropolitan Opera sous la direction de Mikko Franck. Avant l’opéra, Sylvia L’Écuyer animera une table-ronde sur l’opéra au cinéma avec le metteur en scène François Racine, le directeur général de l’Opéra de Montréal, Pierre Dufour, et le directeur général Vancouver Pacific Opera, Patrick Corrigan. Elle proposera un documentaire sur Tosca dans l’histoire lors du premier entracte. Au second entracte, elle s’entretiendra avec Robert Lepage au lendemain de la première de Götterdämmerung, avec la soprano Mireille Asselin qui a chanté le18 janvier derenier à Carnegie Hall ainsi qu’avec la répétitrice au Metropolitan Opera, Denise Massé.

Dans le cadre de l’émission Le mélomane que j’animerai sur les ondes de Radio Ville-Marie demain le dimanche 29 janvier 2012 de 13 h à 15 h, je proposerai la suite et la fin l’audition intégrale des opéras Pelléas et Mélisande de Claude Debussy et de l’opéra Thaïs de Jules Massenet. Pour permettre la fin jde l’audition intégrale des deux opéras, il n’y aura pas de chroniques des revues et des disques cette semaine. La Chronique des événements me permettra de souligner la tenue de plusieurs concerts et l’émission se terminera sur l’air Ebben? Ne andro lontana de La Wally d’Alfredo Catalani interprétée par Marie-Josée Lord qui sera accompagné par l’Orchestre métropolitain lors du concert au bénéfice de l’Institut du cancer de Montréal du vendredi 3 février 2012.

S’agissant des projections d’opéra, celles-ci reprennent aujourd’hui au Café d’art vocal, avec la présentation de Der Rosenkavalier de Richard Strauss dans une production du Festival de Salzbourg de 1962.  Dans le cadre de la série Opéramania et après avoir présenté le prologue et l’Acte I hier soir, le musicologue Michel Veilleux proposera de visionner les actes II et III de Götterdämerrung dans la production du Nederlandse Opera de 1999 dans la mise en scène de Pierre Audi et sous la direction musicale de Hartmut Haenchen. Cette projection aura lieu le vendredi 3 février 2012 à la salle B-421 du Pavillon de musique de l’Université de Montréal à 19 h 30.

Et cette semaine, la chaîne TFO poursuit ses diffusions d’opéra dans le cadre de l’émission Art d’oeuvres et présentera L’Africaine de Giacomo Meyerbeer le dimanche 29 janvier à 20 h. Il s’agit de la production de 2001 du San Francisco Opera dans la mise en scène de Lofti Mansouri. Le Choeur et orchestre du San Francisco Opera sont sous la direction musicale de Maurizio Arean. La distribution comprend notamment Shirley Verrett et Placido Domingo. Pour visionner un extrait de cette production et un très beau duo entre Verrett et Domingo, vous pouvez cliquer ici.

Placido Domingo et Shirley Verrett

Bonne semaine lyrique…!