Archive pour août 2016

Starmania au Festival d’opéra de Québec : un succès indéniable et mérité, un accueil généraux et enthousiaste

lundi 1 août 2016

1er août 2016
(No 2016-26)

Starmnania opéra 2016j.pgÉtienne Dupuis (Johnny Rockfort) et Raphaëlle Paquette (Cristal)
Starmania opéra
Festival d’opéra de Québec, 2016
Photographie : Louise Leblanc, Le Soleil

La pertinence de programmer une reprise de la version lyrique de Starmania opéra pour la sixième édition du Festival d’opéra de Québec – que l’on doit à son directeur général et artistique Grégoire Legendre – n’a pas, de toute évidence, échappé au public qui avait rempli la salle Louis-Fréchette du Grand Théâtre de Québec lors de la première du 30 juillet 2016. Opérer un rapprochement entre le personnage de Zéro Janvier – sorti de l’imagination de Luc Plamondon – et l’actuel candidat du Parti républicain à la présidence américaine Donald Trump n’était pas très difficile lorsqu’on entendait Roger Roger, incarné sur écran géant par James Hyndman, dire que « le célèbre constructeur de gratte-ciels avait annoncé sa candidature officielle en tant que chef incontesté du Parti pris pour le progrès (PPP) aux élections qui éliront le président de l’Occident ». Et il était aussi possible de penser aux terroristes qui agissent aujourd’hui au nom de Daech (État islamique) lors d’un échange entre Cristal et Johnny Rockfort : « Johny Rockfort, vous êtes un hors-la-loi. Johny Rockfort, expliquez-nous pourquoi, pourquoi tous ces crimes anonymes ? Êtes-vous des assassins ou des victimes ? Johny Rockfort, voulez-vous être une star ? Johny Rockfort, pourquoi les Etoiles Noires ? Votre philosophie terroriste est-elle futuriste ou naturiste ? Moi j’me fous d’la politique, j’ai jamais lu un journal, et j’m’en porte pas plus mal ».

Voir ou revoir Starmania opéra permettait non seulement de constater jusqu’à quel point le thème de l’opéra rock conçu par le Québécois Luc Plamondon et le Français Michel Berger et présenté pour la première au seuil des années 1980 était d’actualité. Cela autorisait aussi ceux et celles qui, comme moi, avaient célébré le 400e anniversaire de la ville de Québec avec Starmania opéra et l’avait également vu dans à l’Opéra de Montréal d’apprécier la qualité de l’adaptation lyrique de l’opéra rock. L’orchestration de Simon Leclerc, qui dirigeait d’ailleurs à nouveau l’Orchestre symphonique de Québec (OSQ), a paru encore plus riche et flamboyante qu’en 2008. Et les instrumentistes de l’OSQ, et en particulier ceux et celles de la section des cuivres, ont fort bien rendu la partition lyrique de Leclerc.

Le tour de force du festival aura par ailleurs été de rassembler à nouveau l’ensemble des solistes distribution de la production originale et de faire ainsi appel à des artistes lyriques ayant acquis une expérience et une réelle maturité. Cela est particulièrement évident par Étienne Dupuis qui, en incarnant Johnny Rockfort, a livré une prestation exceptionnelle. Il a démontré pourquoi il est aujourd’hui sollicité par les grandes maisons lyriques de la planète, de Berlin à Paris, et en direction prochaine pour Madrid et New York. Et pourquoi nos compagnies québécoises l’invitent notamment à participer à la création de nouvelles oeuvres, comme l’opéra Les Feluettes présenté par l’Opéra de Montréal au printemps 2016. L’acrobatie vocale auquel il se prête dans S.O.S. d’un terrien en détresse est tout simplement remarquable, mais l’ensemble de la prestation vocale révèle une voix maîtrisée, un timbre radieux et une diction impeccable. Marc Hervieux, dans le rôle de Zéro janvier et avec Les blues du Businessmann, offre un moment de grande intensité lyrique, alors que Lyne Fortin interprète avec force et conviction Les adieux d’un sex symbol. La force de Marie-Josée Lord réside dans son jeu dramatique qui donne une réelle crédibilité au personnage de Marie-Jeanne la serveuse automate. Si certaines ornementations vocales ne sont pas toujours réussies, la soprano offre avec Le monde est stone une finale en suraigüe qui clôture de façon spectaculaire l’opéra.

Starmania opéra- Photographie Marie-Josée LordMarie-Josée Lord (Marie-Jeanne, la serveuse automate)
Starmania opéra
Festival d’opéra de Québec, 2016
Photographie : Louise Leblanc, Le Soleil

Dans le rôle de Cristal, Raphaëlle Paquette se distingue et son interprétation de Besoin d’amour – avec le soutien d’une magnifique chorégraphie signée par Stéphane Boko – est l’un des très beaux moments de la production. Si Pascal Charbonneau et Krista da Silva n’impressionnent guère par leurs prestations vocales, l’un et l’autre incarnent leurs personnages de Ziggy et de Sadia avec une théâtralité digne de mention.

L’intérêt de ce spectacle lyrique à grand déploiement réside aussi dans la mise en scène de Michel Lemieux et Victor Pilon et leur conception visuelle – à laquelle a aussi été associé Gabriel Coutu Dumont. Les décors qui sont aussi du tandem Lemieux/Pilon et d’Anne Séguin Poirier– cette dernière ayant aussi conçue les costumes et accessoires, et l’environnement sonore créé par Pierre Forgues contribuent à situent intelligemment l’action de Starmania dans cet univers sombre qui caractérise le livret de l’opéra.

La reprise de Starmania opéra est un succès indéniable et mérité. Son accueil par le public de la première a été généreux et enthousiaste comme il se devait de l’être. Une deuxième représentation a eu lieu le dimanche 31 juillet et l’opéra pourra être vu à nouveau les 1er, 3 et 4 août 2016 à 20 h. Et il faut en profiter car il pourrait s’agir de la dernière occasion de voir et entendre la version lyrique de l’opéra dont le rayonnement international est freiné, comme l’a révélé Luc Plamondon dans une entrevue (« Josianne Desloges, « Luc Plamondon- Starmania opéra : l’odyssée lyrique », Le Soleil, 29 juillet 2016) en raison du fait que « France Gall ne veut pas qu’on tourne Starmania en opéra, et comme c’est l’héritière de Michel Berger [le compositeur]… Pourtant lui, il aurait beaucoup aimé […] »

Pour un autre commentaire de la production, je vous invite è lire l’article publié dans le Journal de Québec le dimanche 31 juillet 2016 sous la plume d’Yves Leclerc et le titre « Starmania des temps modernes- L’œuvre de Michel Berger et Luc Plamondon est criante de vérité ». L’Opéra– Revue québécoise d’art lyrique a confié le soin à Louis Bilodeau de rédiger une critique de Starmania opéra et vous pourrez lire celle-ci dans le numéro 9 (Automne 2016) dont la parution est prévue à la mi-septembre. Pour la lire, pourquoi ne pas vous abonner à la revue en ligne (http://www.revuelopera.org/revue-abonnement.html) et recevoir, dès la rentrée, cette critique à domicile! Vous pourrez également y lire des critiques des événements tenus dans le cadre du festival la semaine dernière, soit le concert du contre-ténor Christophe Dumaux avec Les Violons du Roy sous la direction de Bernard Labadie qu’a couvert pour la revue la musicologue Irène Brisson et de l’opéra-jeunesse Le serpent et le chat de Nathalie Magnan qu’a vu et entendu notre collaboratrice Marie-Claude Perron.

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Le Festival d’opéra se poursuit cette semaine avec les deux courtes oeuvres lyriques Prima la musica, moi le parole d’Antonio Salieri et Der Schauspieldirektor, dans sa version française intitulée Le directeur de théâtrede Wolfgang Amadeus Mozart. Je vous rappelle que pour Prima la Musica, la distribution comprend Evelyne Larochelle, soprano (Donna Eleonora), Andréanne Guay, soprano (Tonina), Dominic Veilleux, baryton (Poète) et Manuel Provençal, baryton-basse (Maestro). Pour Le directeur de théâtre, l’on pourra entendre  Marjolaine Horreaux, soprano (France de St-Amour), Élisabeth Boudreault, soprano (Mlle Argentine), Dominic Veilleux, baryton (Bouffe), Keven Geddes, ténor (Filvite) et  Éliot Laprise, comédien (Franz). Une première représentation a eu lieu le 31 juillet et deux autres sont prévues pour les 2 et 5 août à 20 h au Théâtre La Bordée.

La brigade lyrique continuera de sillonner les principaux lieux publics et parcs de Québec pour des prestations gratuites du mercredi 3 au dimanche 6 août 2016. L’horaire précis de la tournée de cette semaine est accessible à l’adresse http://festivaloperaquebec.com/evenements/la-brigade-lyrique (cliquer sur voir la programmation). Vous pouvez aussi consulter la dépliant ici. La brigade de 2016 est composée de Carole-Anne Roussel, Evelyne Larochelle, Louis-Charles Gagnon et Marc-André Caron. L’accompagnent au piano sera de Jean-François Mailloux.

Les Grands Feux Loto-Québec clôtureront le festival le samedi 6 août 2016 avec un grand spectacle pyromusical proposant une fusion d’extraits des plus beaux airs d’opéras et une pluie de feux d’artifices. L’événement sera visible à compter de 22 h des deux rives de notre majestueux fleuve Saint-Laurent. La brigade lyrique offrira une prestation musicale au Quai Paquet à Lévis à compter de 21 h.

Pour assister aux événements du Festival d’opéra de Québec de 2016, vous pouvez vous procurer des billets en téléphonant au 418 529-0688 (billetterie de l’Opéra), 418 643-8131 (billetech.com) ou 1 877 643-8131 (ligne sans frais). Pour d’autres informations relatives au festival, vous pouvez consulter son site à l’adresse www.festivaloperaquebec.com ou vous rendre sur sa page Facebook accessible à  https://fr-ca.facebook.com/operadequebec.

Je compte publier un autre numéro estival du présent blogue au lendemain de la clôture du Festival pour en présenter un bilan et vous donner quelques nouvelles au sujet de la suite de notre bel été lyrique québécois !

À la semaine prochaine !