Un front commun sur le système de gestion de l’offre et les règles de financement des partis politiques et des candidats indépendants en 2018

No 2018-03
(4 septembre 2018)

Philippe Couillard  (Parti libéral du Québec), Jean-François Lisée (Parti québécois),
Sylvie D’Amours, Coalition avenir Québec et Manon Massé (Québec solidaire)
Saint-Hyacinthe, 31 août 2018

Pour ce troisième carnet électoral, il est question des positions des partis au sujet de la renégociation en cours de l’ALÉNA… et d’une proposition sur une avenue pour formuler une réponse québécoise à la tentative de mettre fin au système de gestion de l’offre. J’ai aussi pensé utile de reproduire les règles régissant le financement des partis politiques et des candidats indépendants dans le cadre des élections générales québécoises de 2018.

Le front commun en défense du système de gestion de l’offre en matière agricole

 La campagne électorale en cours a donné lieu un moment inédit avec l’émergence d’un front commun des quatre (4) partis politiques représentés à l’Assemblée nationale visant à protéger le système de gestion de l’offre matière agricole. Le Premier ministre et chef du Parti libéral du Québec, Philippe Couillard, le chef de l’Opposition officielle et chef du Parti Québécois, Jean-François Lisée, la co-porte parole de Québec solidaire Manon Massé ainsi que la représentante de la Coalition Avenir Québec, Sylvie d’Amour, ont uni leur voix à celle de l’Union des producteurs agricoles et son président Marcel Groleau le vendredi 31 août pour demander que le système de gestion de l’offre ne soit pas sacrifié dans le cadre de la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA).

Le  même jour, les autorités canadiennes et américaines ajournaient leurs pourparlers sans avoir conclu un accord ou un accord de principe. La question de la gestion de l’offre demeure d’ailleurs une pierre d’achoppement des négociations, le président américain Donald Trump ayant clairement fait savoir qu’il souhaitait l’abolition de ce système. Il a été convenu que les négociations en vue de conclure un accord se poursuivraient le mercredi 5  septembre 2018.

Il est difficile d’anticiper le résultat de cette renégociation, mais il faut noter que le Premier ministre du Canada a laissé entendre qu’il est disposé à faire des compromis sur la question de la gestion de l’offre en matière agricole. Si un nouvel ALÉNA ou un accord bilatéral devait voir le jour et être signé par le Canada et les États-Unis d’Amérique, le Québec ne serait pas démuni et pourrait faire appel à son Assemblée nationale pour refuser son assentiment à ce que le Canada consente à être lié par un nouveau traité entraînant l’abolition du système de gestion de l’offre. Du fait qu’il s’agit d’un accord qui ressortit en partie des compétences constitutionnelles du Québec et qui concerne le commerce international, celui-ci constituerait un engagement international important au sens de la Loi sur le ministère des Relations internationales du Québec (R.L.R.Q., c. M-25.1.1) et requerrait, en application de l’article 22.4 de cette loi, l’approbation de l’Assemblée nationale. L’Assemblée nationale pourrait dès lors rejeter un tel engagement et le gouvernement du Québec pourrait se fonder sur un tel rejet pour refuser son assentiment à ce que le Canada devienne partie à un tel traité. Avant que la négociation ne reprenne ou ne soit menée à terme, ne serait-il d’ailleurs pas opportun que les quatre partis politiques représentés à l’Assemblée nationale fassent savoir que leur front commun se traduira par le refus des députés et députées qu’ils feront élire le 1er octobre 2018 d’approuver toute entente qui abolirait le système de gestion de l’offre tel que nous le connaissons ?

Huit  choses à savoir sur le financement politique 

Sous le titre « Huit  choses à savoir sur le financement politique », le Directeur général des Élections du Québec diffuse de précieuses informations sur cette question auxquelles vous pouvez avoir accès le site d’Élections Québec en cliquant ici . En raison de l’importance des règles régissant le financement électoral au Québec, je reproduis ci-après, avec quelques modifications de forme, l’essentiel de ces informations :

1. Seul un électeur ou une électrice peut faire une contribution à un parti politique

 Les personnes morales, comme les entreprises, les associations et les syndicats, ne peuvent en aucun temps contribuer au financement des partis politiques et des candidats indépendants autorisés. Elles ne peuvent ni faire un don en argent ni offrir un service ou un bien gratuitement. Elles ne peuvent pas, non plus, vous rembourser ou tenter de vous rembourser une contribution que vous avez faite.

2. En 2018, un maximum de 200 $ peut être versé à chacun des partis politiques et des candidats indépendants autorisés

En 2018, vous pouvez donner jusqu’à 200 $ à chacun des partis politiques et des candidats indépendants autorisés. La contribution annuelle maximale est de 100 $, mais vous pouvez verser jusqu’à 100 $ de plus l’année des élections générales ou à l’occasion d’une élection partielle.  Seule une contribution de 50 $ ou moins peut être versée en argent comptant au représentant officiel d’un parti, d’une instance ou d’un candidat ou député indépendant autorisé ou à une personne qui a un certificat de solliciteur. Une contribution de plus de 50 $ doit être versée par carte de crédit ou chèque personnels […].

3. Pour chaque dollar amassé en contribution auprès des électeurs, 2,50 $ sont versés par l’État québécois aux entités politiques

Ce type de financement public s’appelle revenu d’appariement. Il y a toutefois un montant maximum au-delà duquel l’État québécois ne verse plus d’argent. Ainsi, le montant maximum versé par l’État à titre de revenu d’appariement pour une année d’élections générales est de 500 00 $ pour les partis politique (250 000,00 $)  pour toute autre année) et de 2000 $ pour les députés et candidats indépendants. Ces sommes servent à couvrir les dépenses se rapportant notamment à l’administration courante, par exemple la location d’un local, à la diffusion d’un programme politique, par exemple la mise en ligne d’un site Web, à la coordination de l’action politique des membres ou sympathisants, par exemple le congrès annuel ou aux dépenses électorales, par exemple les pancartes électorales.  En 2017, des revenus d’appariement d’environ 1 130 000 $ ont été versés aux partis politiques. Ces revenus constituaient 7 % du revenu annuel des partis politiques représentés à l’Assemblée nationale et environ 27 % du revenu annuel des autres partis.

4. La publicité constitue souvent la principale dépense électorale des partis politiques

Les dépenses électorales des partis politiques et des candidats indépendants se classent en quatre catégories : la publicité,  ‘achat de biens et services, la location de locaux et les frais de voyage et de repas. Le total des dépenses électorales de quatre partis politiques représentés à l’Assemblée nationale lors des élections générales de 2014 a été le suivant : Parti Québécois 6 595 37,00 $; Parti libéral du Québec : 5 871, 696,00 $; Coalition Avenir Québec 3 328 876 $; Québec solidaire : 1705 840,00 $. Ces montants représentent le total des dépenses électorales engagées et acquittées par ces partis politiques. Il est par ailleurs est interdit à tous les partis politiques et candidats de faire de la publicité les sept premiers jours de la campagne électorale et le jour même des élections?

 5. Les dépenses électorales sont limitées à un même montant pour toutes les personnes candidates au sein d’une même circonscription

C’est une question d’équité afin que toutes les personnes candidates puissent dépenser des sommes similaires pour promouvoir leur candidature. Pour les partis politiques, la limite est de 0,69 $ par électeur. Pour les personnes candidates, la limite est de 0,75 $ par électeur dans la plupart des circonscriptions. La limite de dépenses électorales pour les partis politiques qui présenteront des candidatures dans les 125 circonscriptions est d’un peu plus de 4,2 millions de dollars. Pour les candidates et les candidats, la moyenne des limites de dépenses électorales dans les circonscriptions est d’un peu plus de 49 000 $.

6. Ni les citoyens ni les entreprises ne peuvent dépenser pour favoriser ou défavoriser l’élection d’une personne candidate pendant la période électorale

 Du 30 août au 1er octobre, les citoyens et citoyennes ne peuvent pas faire une intervention sur la scène publique si cette intervention qui a un effet partisan, par exemple en favorisant ou en défavorisant l’élection d’une personne candidate ou qui engendre des coûts, par exemple l’impression de documents, comme des affiches ou des dépliants ou la création d’un site Web. La même règle s’applique aux personnes morales, comme les entreprises, les associations et les syndicats. Toute dépense électorale doit être payée et autorisée par l’agent officiel d’un des candidats ou des partis politiques. Il faut savoir que tout parti politique et tout candidat indépendant autorisé doivent chacun avoir un représentant officiel pour gérer leurs revenus ainsi que leurs dépenses courantes. En période électorale, un agent officiel doit aussi être nommé pour gérer les dépenses électorales.

Les dépenses électorales sont limitées à un même montant pour toutes les personnes candidates au sein d’une même circonscription. C’est une question d’équité, pour que chaque personne ait un budget similaire à celui des autres pour promouvoir sa candidature. Pour assurer l’application de cette règle, seuls les agents officiels des partis politiques et des candidats indépendants autorisés peuvent faire des dépenses électorales. Cela assure également une plus grande transparence, puisque toutes les dépenses doivent ensuite être présentées dans un rapport à des fins de contrôle, dans un souci de préserver la confiance de l’électorat en notre système démocratique.

Une personne ne peut pas payer pour la diffusion, sur Facebook, d’une publicité qui vise à valoriser ou à dévaloriser une mesure proposée par un parti. Une entreprise ne peut pas acheter une publicité dans un journal pour prendre position sur un acte accompli par un candidat. Un individu ne peut pas imprimer à ses frais des affiches visant à faire la promotion d’une candidate dans son milieu de travail ou dans tout autre lieu public. Une association ne peut pas appuyer un candidat sur son site Web, puisque la création et l’entretien de ce site Web ont généralement un coût.

Une personne peut intervenir durant une élection se ses interventions ne coûtent rien. Il est possible par ailleurs de réclamer le statut d’un intervenant particulier.  Un intervenant particulier est un électeur ou un groupe d’électeurs qui peut dépenser jusqu’à 300 $ en publicité au cours d’une période électorale pour  faire connaître son opinion sur un sujet d’intérêt public ou obtenir un appui à une telle opinion ou  encourager les électrices et les électeurs à annuler leur vote ou à ne pas aller voter. Il peut s’agir aussi d’un groupe, non constitué en personne morale, composé de personnes physiques dont la majorité de celles-ci ont la qualité d’électeur. Les personnes physiques d’un tel groupe agissent ensemble à la poursuite d’un but commun. Lorsque l’intervenant particulier est un groupe, les membres doivent désigner un représentant parmi les électeurs du groupe. Afin d’obtenir une autorisation, il faut remplir et soumettre le formulaire prévu à cet effet et disponible sur le site électronique d’Élections Québec.  Le message ne doit toutefois pas favoriser ou défavoriser directement l’élection d’une personne.

7. Un vote a une valeur financière

Les dépenses électorales d’une personne élue ou ayant obtenu au moins 15 % des votes seront remboursées à hauteur de 50 % à son représentant officiel. Il en est de même pour les partis politiques obtenant au moins 1 % des votes. Pour être remboursées, ces dépenses doivent avoir été faites et payées conformément à la Loi électorale. Une aide financière annuelle établie en fonction du nombre de votes obtenus est accordée aux partis politiques.  La somme totale divisée entre ces partis se calcule en multipliant 1,58 $ par le nombre d’électeurs inscrits sur la liste électorale. Cette somme est redistribuée proportionnellement au pourcentage de votes obtenus par chaque parti. Ainsi, chaque personne inscrite sur la liste électorale génère la somme de 1,58 $ et les personnes qui votent déterminent comment la somme totale est distribuée entre les partis.

Le remboursement des dépenses électorales et l’allocation annuelle sont deux sources de financement public, c’est-à-dire qu’elles proviennent de l’État. Le financement public vise à favoriser l’intégrité et la vitalité de notre démocratie en soutenant les personnes qui travaillent dans le domaine politique.  Après les dernières élections générales, en 2014, 225 personnes candidates ont eu droit au remboursement de leurs dépenses électorales. Le total des dépenses remboursées était de 2 530 299,36 $. En ce qui a trait à l’allocation annuelle, les partis politiques ont reçu environ 9 400 000,00 $ en 2017.

8. Tous les revenus et les dépenses des partis politiques sont examinés

Chaque parti politique et chaque candidat indépendant autorisé devra produire un rapport de dépenses électorales après les élections du 1er octobre. Le directeur général des élections examinera tous ces rapports pour s’assurer que les règles sur le financement politique sont respectées. De sa propre initiative ou à la réception d’une plainte, le directeur général des élections peut entreprendre des enquêtes pour déceler les contraventions à la Loi électorale et intenter les poursuites judiciaires qui en découlent. Si l’institution qu’il dirige en toute indépendance demeure à l’affût, la vigilance et l’appui des citoyens et des acteurs travaillant sur le terrain peuvent avoir des effets déterminants. Il est possible de signaler toute irrégularité en matière de financement politique par l’entremise auprès d’Élections Québec. Les informations reçues sont traitées en toute confidentialité.

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Je vous souhaite une bonne troisième semaine de campagne… et serai de retour le 10 septembre avec le quatrième de sept carnets électoraux !